1916 – Verdun (21 février au 16 décembre 1916)
Le lundi 21 février 1916, à 7 heures, l'attaque du Kronprinz se déclenche sur le front Nord de Verdun. Le front Est, tout d'abord, ne paraît pas très inquiété. Un prisonnier fait aux Bois Communaux par l'unité voisine (le 20e territorial) prétend tout ignorer de l'attaque encours et des projets de son régiment. Cependant devant les progrès de l'ennemi, le haut commandement a décidé de transporter la résistance au pied des Hauts-de-Meuse, et dans la nuit du 24 au 25 février, à 2 heures du matin,la division reçoit l'ordre d'évacuer la Woëvre. Les unités voisines se sont également repliées.
Les hommes sont aux emplacements même qu'ils fortifient depuis six mois : pas un pouce de terrain, pas un bouquet d'arbres qui ne leur soit familier. Les groupes ennemis qui cherchent à entrer sont obstinément rejetés hors du village. A Champlon, l'ennemi porte sa première attaque, le 26, après un bombardement par obus de gros calibre qui a bouleversé les lignes et les abris. Champlon reçoit le choc de tout un régiment, toutes communications sont coupées avec le bataillon et avec les unités voisines, une compagnie enfermée dans un îlot, se bat jusqu'au soir et succombe sous le nombre, l'ennemi n'ose encore aborder Fresnes de front, et le dimanche 27, il porte son attaque sur Manheulles avec une brigade entière. Maître des deux ailes, Champlon et Manheulles, l'ennemi commence alors sur le joli pays de Fresnes un bombardement sans arrêt, d'une violence inconnue ! Pendant quatre jours, écrasé sous l'amoncellement des ruines, privé de tout ravitaillement, le bataillon continue de « tenir ». Les villages de l'arrière ne sont pas épargnés.
Dans la nuit du 3 au 4 juin, 40 hommes sous les ordres d'un capitaine, d'un sous-lieutenant
d'un lieutenant, exécutent un coup de main sur le front tenu par le régiment. Entre Lamorville et le moulin de Relaincourt, une forte patrouille ennemie est attaquée et détruite ; deux prisonniers sont capturés. L'ennemi réagit vivement et attaque, le 8 juin, le front tenu par un bataillon, mais il ne réussit à forcer la ligne nulle part et la fin de juin n'amène aucun incident.
La Somme
Début juillet 1916, s'engage l'offensive Franco-Anglaise dans le département de la Somme, Après dix jours de repos à Grivesnes et Le Plessier (Somme), le 330e entre en scène, cantonne le 11 juillet à Cayeux-en- Santerre (30 km à l'est d'Amiens) et relève la 101e brigade dans le secteur de Lihons, à l'extrême sud du front d'attaque, dans la nuit du 12 au 13. II appartient désormais à la VIe armée (général Micheler).
La fin de juillet, le mois d'août se passent dans un calme relatif, sous le bombardement ordinaire, très violent à certaines heures et notamment le 20 juillet. Le 330 attend son tour. Les deux bataillons se relèvent entre eux, relèvent le 303 ou la 101e brigade, dans le secteur du Bois Etoilé, la Briqueterie, le Bois Madame, le saillant de Nuremberg, puis au Camp des Chasseurs et à la Carrière Partizon. Les cantonnements de repos sont à Caix-Rosières, la Tour Carrée, Bayonvilliers.
Le lundi 4 septembre, les bataillons, sont en ligne, soutenus par un peloton de mitrailleuses. Un
commandant dirige l'attaque: premier objectif: la tranchée de l'Eclipse et de Mercure ; second : le bois Oertel et la tranchée de Saturne ; à 14 heures, un bataillon quitte les parallèles de départ ; en quelques secondes, les réseaux sont franchis, les vagues
d'assaut dépassent les deux premières lignes et parviennent au premier objectif. Un capitaine enlevant brillamment sa compagnie, est blessé en atteignant ses objectifs ; une mitrailleuse ennemie continuant à tirer sur son unité, il s'en empare après avoir tué les servants. La pièce est brisée sur place. Blessé une deuxième fois, cet intrépide officier, après avoir été capturé par l'ennemi, réussit à s'évader, à rentrer dans nos lignes dans la nuit du 4 au 5 septembre. Une nouvelle attaque reprend le 7 au petit jour ; une compagnie s'avance dans la tranchée de l'Eclipse, un groupe allemand fait mine de se rendre et pousse le cri de « Kamerad ». Le capitaine se lève pour le recevoir et tombe traîtreusement frappé à bout portant.
Le 7 septembre au soir, l'effectif du régiment n'est plus que de 8 officiers, 580 hommes !
le 8 ; les patrouilles s'avancent vers la tranchée de Saturne ; on se bat à tous les barrages des boyaux. Le 9, la journée reste calme ; à 22 heures, l'ennemi contre-attaque, mais il est arrêté par nos tirs de barrage.
Le 11 septembre 1916, le lieutenant-colonel Pluyette pouvait justement adresser à son régiment l'ordre ainsi conçu :
« Pendant six jours de combat, du 4 au 10 septembre, les soldats du 330 ont fait preuve des qualités de crânerie, d'audace, de ténacité qui les ont égalés aux troupes d'élite les plus renommées. Le lieutenant-colonel est fier de commander à de pareilles troupes. Ilsalue au nom de tous les morts du régiment, tombés glorieusement pour la patrie. »
L'attaque d'Ablaincourt, le 7 novembre, amène sur le secteur une forte réaction ennemie.
Le village de Rouvroy est violemment bombardé : 400 obus le 13, de 6 heures à midi.
L'ennemi effectue de fréquentes patrouilles. Les compagnies sont alertées presque chaque nuit ; la division effectue des émissions de gaz auxquelles l'ennemi répond par des obus toxiques ; c'est l'époque des grenades à ailettes ; les avions survolent sans arrêt le secteur.
Le général Joffre, commandant en chef, « adresse l'expression de sa profonde satisfaction
aux troupes qui combattent sur la Somme... Verdun, dégagé, 25 villages reconquis, 35.000 prisonniers, 150 canons, les lignes successives ennemies enfoncées sur 10 kilomètres de profondeur, tels sont les résultats obtenus ».